Forêts en récits
C.21.I.03



Année - 2021
Lieu - Selestat, France
Programme - Installation / Espace Public
Surface - NC
Biennale d’art contemporain “SELEST’ART”
“Forêt dans la Ville”





A l’entrée de la vieille ville de Sélestat, la tour des sorcières, ancien lieu d’enfermement de celles à qui on attribuait des pouvoirs maléfiques, demeure un témoin du passé. En cet objet désormais cerné par la maille urbaine, il s’agira d’éprouver l’éclat essentiel de la forêt.

Longtemps porteuse d’un imaginaire sombre, infréquentable, la forêt a en commun avec les sorcières, une mise au ban insolente. Lieu symbolique pour maintes cultures, vecteur d’équilibre tant du monde animal que végétal, allié précieux de la vie sur terre, objet de discorde et d’union sacrée, la forêt concentre un répertoire aux multiples facettes. En son sein, l’arbre tient une place essentielle. Si l’on cherche à sortir de son acceptation purement générique pour l’étudier dans sa diversité, il a vocation à demeurer mystérieux, insaisissable. Comme le souligne le botaniste Francis Hallé : (voir extrait).

Si l’arbre est l’élément le plus usité lorsqu’il s’agit de décrire la forêt, il fait partie d’un tout complexe et irréductible englobant une richesse et une diversité organique inestimable. C’est pour mettre en scène cet enchevêtrement impénétrable que nous proposons aux passants de prendre place dans une œuvre en mouvement. Dans la continuité de la rue, en ce passage désormais usuel, s’ouvrira un antre mystérieux. Cet abri en cœur de ville sera une porte vers une forêt imaginaire. Dans sa partie interne, bousculant le chemin linéaire et attendu, une assemblée proposera un arrêt dans le présent qui file.

Elle sera une mise en lumière du temps indispensable de la rencontre. On pourra s’y poser et questionner la place de la forêt dans l’histoire particulière de chacun. Et sur des fils suspendus, accrocher des objets, dessins et textes, comme autant d’arbres pour une forêt de récits en dialogue. Et qui sait, ces rassemblements d’idées ou de corps pourront contribuer à déplacer le regard et construire une histoire commune au vivant dans toutes ses variantes.



« […] Si vous allez dans une école de forestière en Europe, on vous donnera une définition de l’arbre qui ne concerne que l’arbre d’Europe, comme si le seul vrai arbre était le « nôtre » avec un tronc unique, du bois, des branches, une couronne foliaire dense et une hauteur totale de plus de sept mètres. Le chêne, le hêtre et le tilleul sont à leur aise mais ni les arbres fossiles, ni les arbres tropicaux ne répondent à cette définition. Dans les tropiques, certains arbres n’ont pas un mais une douzaine de troncs ; d’autres n’ont pas de branches, ni de bois, comme les palmiers ; d’autres encore n’ont pas de feuilles, comme les cactus arborescents ou les grands euphorbes d’Afrique. Un jour, je suis parvenu à formuler une définition qui me convenait, jusqu’à la découverte des arbres souterrains, dans la savane d’Afrique du Sud, près de Pretoria. Ma définition s’est écroulée, car ces arbres souterrains n’y trouvaient pas leur place. […] ». Extrait de l’Atlas de botanique poétique, les arbres souterrains (2016) de Francis Hallé.