La place hypothétique de l’arbre
C.21.I.01




Année - 2020/2021
Lieu - Riorges, France
Programme - Installation / Espace Public
Surface - 64m²
Parcours d’art actuel  “A ciel ouvert”







Bordant la ville de Roannes, Riorges s’élance, guidée par les ébats de la Renaison, union de La Tâche et du Rouchain, qui se faufile parmi ruelles et habitations jusqu’à se jeter dans l’afflux de La Loire. À travers champs, entre bosquets, au souvenir des locomotives, côtoyés par châteaux et jardins, on chemine sous l’ombre ardente des saules, des frênes, des hêtres happés par la rivière torrentielle. Au détour de ces méandres, la plaine de la Rivoire apparaît. En son âme, irruption d’un halo, pour une terre à nu, invitation à déchiffrer l’idiome de ce paysage. Dans un climat pléthore d’informations, un appel à converger vers une concentration partagée. Prendre part au fil d’un récit unanime.

Nous proposons la fabrication d’une assemblée pour délibérer le commun. En prémisse, déterminer ensemble un point d’attention dans la plaine. Puis dans cette place close, inaccessible, invoquer le bon sens collectif. Faut-il creuser un passage pour désenclaver cette ronde réservée ? Enfin, réunis autour de ce point d’induction déclencher un débat autour de la plantation d’un arbre en son sein.
Mais quel arbre ? Pourquoi ?

Après ce symposium préalable, libres sont les pas. Bordée par les vents, ouverte aux confluences humaines et animales, la Place hypothétique de l’Arbre devient un amplificateur au service des possibles, un prélude tourné vers l’essence du lieu. Où saisir le temps en son envol, planter une trace avant l’effacement.




«Le berger […] alla chercher un petit sac et déversa sur la table un tas de glands. Il se mit à les examiner l’un après l’autre avec beaucoup d’attention, séparant les bons des mauvais. […] Quand il eut ainsi devant lui cent glands parfaits, il s’arrêta et nous allâmes nous coucher. […] Le lendemain, il fit sortir son troupeau et il le mena à la pâture. […] Arrivé à l’endroit où il désirait aller, il se mit à planter sa tringle de fer dans la terre. Il faisait ainsi un trou dans lequel il mettait un gland, puis il rebouchait le trou. Il plantait des chênes. Je lui demandais si la terre lui appartenait. Il me répondit que non. Savait-il à qui elle était ? Il ne savait pas. Il supposait que c’était une terre communale, ou peut-être, était-elle la propriété de gens qui ne s’en souciaient pas ? Lui ne se souciait pas de connaître les propriétaires. Il planta ainsi ses cent glands avec un soin extrême. […] Depuis trois ans il plantait des arbres dans cette solitude. Il en avait planté cent mille. Sur les cent mille, vingt mille étaient sortis. Sur ces vingt mille, il comptait encore en perdre la moitié. […] Restaient dix mille chênes qui allaient pousser dans cet endroit où il n’y avait rien auparavant.»         Extrait de l’Homme qui plantait des arbres (1953) de Jean Giono